Tribune
Publié le 22 juin 2017
Hugues Sibille

Hugues Sibille

Président du Labo de l'ESS

Et maintenant ?

Un nouveau cadre exécutif et législatif est en place. Après un an de rebondissements électoraux, passons enfin aux actes. Que restera-t-il de ces 12 mois de campagne en termes de débats sur des projets de société ? La déroute des anciens partis de gouvernement sanctionne une incapacité à proposer de nouvelles visions du monde, des projets mobilisateurs, l’équivalent du film "Demain" en politique. Elle marque également l’échec d’une génération politique, gauche et droite, plus intéressée par le pouvoir ou l’argent que par l’intérêt général.

Et maintenant, qu’en sera-t-il de notre Utopie d’économie sociale et solidaire ? Que faire ?

A la différence de cette génération politique (qui s’est peu intéressée à l’espoir ESS) nous devons porter haut et fort quelques convictions. C’est l’ambition du Labo de l’ESS avec son projet REVE. Notre conviction est qu’il faut partir des expérimentations territoriales pour construire les nouvelles politiques publiques. S’inspirer de ce qui marche : "bottom up", et non de conceptions technocratiques "top down". Notre conviction est qu’il faut les co-construire, ces politiques publiques, dans un nouveau rapport avec les citoyens et la société civile, dans de nouvelles alliances d’intérêt général. Notre conviction est que l’ESS peut jouer un rôle stratégique non exclusif dans ces transitions, si elle articule des valeurs, des statuts et des pratiques. Notre conviction est que le projet ESS sera crédible s’il propose des solutions concrètes et alternatives à quelques grands enjeux : transformer l’emploi et redonner du sens au travail, inventer des réponses coopératives et solidaires pour réussir la révolution digitale, réduire les fractures territoriales et entreprendre de nouvelles économies de proximité plus inclusives, donner pouvoir d’agir et place dans la société à une jeunesse tenue à l’écart...

Ensuite, le Labo de l’ESS entend dire "chiche" au Président de la République sur trois de ses préoccupations. En nommant Nicolas Hulot il met l’accent sur la transition écologique ET solidaire. Chiche ! Nous sommes prêts à promouvoir une transition énergétique citoyenne (coopératives d’énergies renouvelables), à organiser une éducation populaire à la sobriété énergétique, à faire changer d’échelle une économie circulaire d’insertion… et à le faire toujours en lien avec les enjeux sociaux et solidaires, pour nous indissociables des problématiques écologiques : à travers les circuits courts, les nouvelles formes d’emploi, la coopération des acteurs dans leur territoire... Ensuite l’innovation, chère au cœur d’Emmanuel Macron. Chiche ! Chiche de faire de l’innovation sociale une grande ambition nationale, à co-construire l’accélérateur d’innovations sociales annoncé pendant la campagne, à mettre en place un crédit d’impôt recherche en innovation sociale, à organiser une contractualisation entre l’État, les collectivités locales et l’ESS sur ces sujets. Enfin l’Europe dont on sent bien qu’elle est le vrai (le seul ?) ciment de ce gouvernement. Chiche ! Chiche que la France reprenne le leadership pour promouvoir l’ESS en Europe, comme elle l’avait fait à l’époque de Jacques Delors. Construire un axe franco-allemand sur quelques thèmes, réunir vite un Conseil des Ministres européens sur l’ESS, inscrire l’ESS dans la prochaine programmation de la Commission, réunir à Paris des États généraux européens de l’ESS... Les idées ne manquent pas, ce qui a manqué jusqu’ici, c’est la volonté politique.

Oui, les idées ne manquent pas. Le Conseil Supérieur de l’ESS a produit un très bon document proposant une stratégie cohérente et documentée de développement de l’ESS. Mettons le en chantier par un Pacte quinquenal.

Pour tout cela il faut maintenant un cadre et des moyens. Le cadre législatif, ce serait un groupe de travail parlementaire sur l’ESS à l’Assemblée ; le cadre exécutif, ce serait un secrétariat d’État à l’ESS ou équivalent, permettant de sortir de l’affichage pour entrer dans le dur d’un État stratège et animateur en ESS. Les moyens, ce serait faire en sorte que la Délégation Interministérielle, qui a fait du bon travail dans la précédente législature, voit ses équipes et budgets significativement renforcés.

Pour finir en souriant, faisons en sorte que dans les semaines à venir l’ESS soit ... en marche ! L’attente est forte.

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