
Intérêt général et concurrence
Rédigé par Michel Catinat, référent sur les thématiques européennes au Labo de l’ESS et membre du Haut-conseil à la vie associative, Chantal Bruneau, Vice-Présidente du Haut-conseil à la vie associative et Claudine Jasson, Présidente de la commission juridique, comptable et fiscale du Haut-conseil à la vie associative
Centrale pour les associations et – plus largement – pour l’ESS, la notion d’intérêt général n’est précisément définie ni à l’échelle nationale, ni à l’échelle européenne. En France, cette notion se trouve de fait bien souvent appréhendée de façon restrictive, selon une doctrine fiscale dictée par la seule séparation binaire entre activité concurrentielle et non-concurrentielle. En découlent de nombreuses incertitudes pour ces organisations, confrontées à des décisions administratives qui prennent mal en compte leurs spécificités et la nature des innovations qu’elles mettent en œuvre et ignorent leur contribution à l’intérêt général.
Le Haut-conseil à la vie associative (HCVA) a produit en juin 2025 un rapport faisant état de ces enjeux et formulant de précieuses recommandations. Membres de cette institution, Michel Catinat, Chantal Bruneau et Claudine Jasson nous en proposent une synthèse.
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La notion d’intérêt général est primordiale pour l’économie sociale et solidaire (ESS). Parmi les différents critères définissant l’ESS, la contribution à l’intérêt général apparaît explicitement. Dans la définition de l’ESS donnée par le Centre de documentation Économie Finances (CEDEF)[1], la recherche de l’intérêt général figure parmi les quatre grands principes de l’ESS. Au niveau européen, la définition de l’économie sociale[2] fait également apparaître le concept d’intérêt général : « […] le réinvestissement de la plupart des profits et excédents dans des activités dans l’intérêt des membres ou utilisateurs (« intérêt collectif ») ou de la société au sens large (« intérêt général ») »[3].
Et pourtant, le concept d’intérêt général n’a jamais reçu de définition légale ou jurisprudentielle – autre que fiscale – pas plus au niveau français qu’au niveau européen. En France, dans la loi du 31 juillet 2014, c’est la notion d’utilité sociale qui est définie. La notion d’intérêt général, quant à elle, reste peu précise dans les faits et donne lieu à des appréciations différentes selon les services de l’État concernés. Au niveau européen, la situation est tout aussi floue d’un point de vue juridique. Si les services d’intérêt général sont mentionnés dans le Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) essentiellement pour préciser les compétences de l’UE[4], la Directive sur les services ne donne aucune définition juridique des services d’intérêt général, encore moins de la notion d’intérêt général, et sa transposition dans la législation française a généré une forte incertitude sur la frontière entre les services sociaux d’intérêt général économiques et non économiques. A notre connaissance, aucun pays membre de l’UE n’a défini juridiquement le concept d’intérêt général.
Outre l’absence de définition juridique, la contribution essentielle à l’intérêt général de l’ESS, qui doit guider les politiques publiques de soutien aux acteurs qui la constituent, se trouve de moins en moins reconnue politiquement par les pouvoirs publics. Dans les faits, ces derniers tendent à privilégier, dans leur approche, l’application des règles de concurrence au détriment de la promotion de l’intérêt général. Le Haut conseil à la vie associative (HCVA), dans son rapport de juin 2025[5] intitulé Des propositions pour reconnaître, soutenir et encourager la contribution des associations à l’intérêt général dans un contexte concurrentiel a alerté sur cet état de fait. Il a émis tout un ensemble de préconisations afin que l’intérêt général reste un critère essentiel pour la conduite de la politique économique française. Il en va de la cohésion et de l’innovation sociales. Conformément à sa mission, les préconisations du HCVA concernent les associations, mais l’enjeu s’étend en réalité à l’ensemble des différentes composantes de l’ESS.
Le présent décryptage vise à contribuer à la prise de connaissance par l’ensemble des acteurs de l’ESS du contenu du rapport du HCVA, mais également à susciter les prises de position de la part des composantes de l’ESS dans le but d’obtenir une pleine reconnaissance politique de la notion d’intérêt général qui se traduise dans les orientations des politiques économiques.
Une appréciation de l’intérêt général trop dictée par la doctrine fiscale
Aujourd’hui en France, l’appréciation de l’intérêt général est dictée par la doctrine fiscale. Cette dernière considère qu’une association est d’intérêt général si sa gestion est désintéressée[6], si ses activités rencontrent un public dépassant un cercle restreint de personnes et si elle développe une activité non lucrative de façon prépondérante. De cette appréciation découlent notamment l’assujettissement ou non aux impôts commerciaux de l’association, et sa possibilité à continuer ou non à faire appel aux dons défiscalisables. En d’autres termes, la qualification d’intérêt général d’une association résulte globalement de l’appréciation du caractère concurrentiel ou non de ses activités.
Pourtant, d’autres codes que le Code des impôts (notamment dans ses articles 200 et 238 bis) décrivent des activités d’intérêt général. C’est le cas par exemple du Code de l’environnement, du Code du sport ou du Code minier, selon des critères différents. Comme le souligne le rapport du HCVA, d’autres lois et codes n’attribuent des prérogatives aux associations que si elles sont d’intérêt général au regard des critères du Code général des impôts, alors qu’il n’existe aucun enjeu fiscal à ces références[7].
En somme, la qualification d’intérêt général d’une association ne devrait pas dépendre de la seule administration fiscale et de l’appréciation de son caractère d’intérêt général à l’aune de la concurrence. Tous les ministères ayant un lien avec l’activité de l’association concernée devraient être impliqués et la qualification d’intérêt général d’une association devrait pouvoir dépendre de l’appréciation réelle de sa contribution à l’intérêt général. Le HCVA demande ainsi que soit « sollicité l’avis de tous Ministères ayant un lien avec les activités de l’association » (et pas uniquement du Ministère de l’économie et des finances) pour déterminer le caractère d’intérêt général d’une association.
Prémunir les associations de la perte de leur caractère d’intérêt général suite au développement d’activités économiques pour leur permettre de mener à bien leurs missions sociales
La baisse des aides directes publiques aux associations, notamment les subventions, que l’on observe au cours des dernières années, les conduit depuis longtemps à développer des activités économiques nécessaires à la pérennité de leurs projets, et dans le prolongement de leurs missions sociales, par exemple sous forme de ventes de biens ou de services. Elles y sont d’ailleurs encouragées par les pouvoirs publics qui les poussent à faire évoluer leur modèle économique. Mais le paradoxe est que, ce faisant, les associations risquent de perdre leur caractère d’intérêt général, d’être soumises aux impôts commerciaux, et en conséquence de ne plus pouvoir accéder aux dons, ce qui contribue à amplifier encore plus la perte de ressources financières.
Face à cette situation, qui malheureusement risque de s’aggraver encore plus dans le futur, le HCVA préconise deux types d’actions :
- D’une part, actualiser les critères sur lesquels se fonde l’administration fiscale pour évaluer le caractère d’intérêt général d’une association afin de mieux prendre en compte le fait que les associations répondent à des besoins mal ou non satisfaits et créent de l’utilité sociale pour la société et pour les populations auxquelles elles s’adressent. Ces critères doivent porter sur la structure, l’organisation, la gouvernance et le caractère désintéressé de l’association concernée, ainsi que sur ses activités. Le HCVA avait déjà proposé le type d’activité à prendre en compte : philanthropique, humanitaire, social, éducatif, familial, tourisme social, développement des territoires, sportif, scientifique, culturel, défense de l’environnement, développement économique et éducation à la citoyenneté française et européenne[8].
- D’autre part, assouplir les règles de l’administration fiscale pour l’assujettissement des associations aux impôts commerciaux. L’administration fiscale devrait accepter qu’une association ait une activité économique lucrative avec excédent et ne pas la taxer dès lors que cette activité contribue à la mission de l’association et que les bénéfices sont réinjectés en totalité dans l’activité d’intérêt général.
Sécuriser les opérations de filialisation
Depuis les instructions fiscales de 1998 et 1999, les associations ont la possibilité d’externaliser leurs activités économiques lucratives au sein d’une filiale et ainsi de les isoler de leurs activités non lucratives. Cette possibilité présente potentiellement l’avantage de concentrer l’ensemble des activités fiscalisées et de ne pas remettre en cause le caractère d’intérêt général attribué à l’association mère.
La réalité est malheureusement tout autre. L’administration fiscale, dans le cadre d’un contrôle, peut décider que l’association mère, parce qu’elle exerce un réel contrôle sur sa filiale, soit aussi fiscalisée par « contamination ». Le HCVA demande donc de faire évoluer la doctrine fiscale pour apporter la sécurité nécessaire, notamment en précisant la notion de « communauté d’intérêts », en adaptant la méthodologie d’évaluation aux spécificités des associations et en révisant la doctrine fiscale en matière de relation privilégiée entre une association et sa filiale.
Mieux prendre en compte les spécificités et les besoins des associations dans la législation de l’UE
Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) attribue à l’Union une compétence exclusive sur l'établissement des règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur. Ces règles ont un champ d’application très large et ne reconnaissent en rien les spécificités des associations et autres composantes de l’ESS.
Le modèle d’entreprise considéré dans la quasi-totalité de la législation européenne est l’entreprise à but lucratif. Il en résulte la mise en place de règles ou actes législatifs européens qui sont au mieux inappropriés, et au pire défavorables aux associations et à l’ensemble des acteurs de l’ESS. Cette situation est la conséquence directe du TFUE et plus précisément de son Art. 54 §2 qui segmente les formes d’entreprises en seulement deux catégories : les entreprises lucratives et les entreprises non-lucratives. Cette segmentation est trop sommaire et théorique pour refléter la réalité économique. Pour ne donner qu’un exemple, comment classifier une association non lucrative qui est amenée à développer de façon complémentaire des activités économiques lucratives faute de pouvoir accéder à d’autres sources financières ?
D’autres critères sont manifestement nécessaires pour catégoriser les formes d’entreprises, à savoir notamment les modalités qui gouvernent l’organisation de l’activité et régissent la répartition des excédents. Le HCVA demande donc à la Commission européenne d’adopter une communication interprétative de l’Art. 54 §2 qui permette de pleinement reconnaître la forme d’organisation des associations avec ses spécificités, et d’une façon générale celle des entreprises de l’ESS.
Le plan d’action européen sur l’économie sociale a envisagé, sous condition de justification avérée, une révision du règlement général d’exemption par catégorie (RGEC)[9] sur les aides à l’accès des entreprises sociales au financement et sur les aides à l’embauche de travailleurs défavorisés. L’étude-support ayant identifié des barrières pour ces types d’accès, la Commission européenne a lancé une consultation publique entre le 14 juillet et le 6 octobre 2025 pour préparer la révision du RGEC. Le HCVA a sollicité cette révision, tout en demandant que les restrictions éventuelles tiennent compte des spécificités des associations et autres entreprises de l’ESS.
Enfin, le HCVA préconise que la Commission européenne prépare un plan d’action sur les services d’intérêt général comme proposé par le rapport d’Enrico Letta[10] commandité par le Conseil européen. Deux demandes spécifiques et importantes accompagnent cette préconisation : le plan d’action devrait inclure une définition européenne de la notion d’intérêt général et couvrir les services sociaux d’intérêt général afin de mieux délimiter les activités économiques et non économiques de ces derniers.
Soutenir l’innovation sociale des associations
Les associations ont souvent un rôle pionnier et offrent des services ou des biens innovants pour satisfaire des besoins que les acteurs lucratifs ignorent, faute de rentabilité avérée. Parfois, des associations, après avoir pris les risques de tester différentes approches pour satisfaire ces besoins, parviennent à des solutions présentant une rentabilité établie. Alors, des entreprises lucratives décident d’entrer sur ces nouveaux « marchés »[11]. Le paradoxe est que, dans un tel cas, l’administration fiscale considère souvent que l’association entre en concurrence avec des entreprises lucratives et en conséquence décide de la soumettre aux impôts commerciaux. Le HCVA demande que, dans ce cas de figure, soit maintenue l’exonération des impôts commerciaux pour motif d’antériorité. Faute de cela, c’est le rôle d’innovation sociale des associations qui risque d’être impacté négativement, voire de disparaître.
Le financement de l’innovation sociale est d’une manière générale un enjeu important pour les associations. Non seulement la définition de l’innovation sociale issue de la loi dite « Hamon » apparaît aujourd’hui limitative (absence de critères objectifs, limitation du champ et des acteurs)[12], mais surtout l’innovation sociale de l’ESS ne bénéficie pas d’un système de financement aussi favorable que celui des entreprises commerciales. Pour faciliter le financement de l’innovation sociale, le HCVA préconise un effort de promotion des différentes possibilités de financement, la création d’un fonds national de soutien spécifique, voire la mobilisation des crédits du Fonds de développement de la vie associative (FDVA).
Reconnaître dans la Constitution française la contribution des associations au service de l’intérêt général
Les associations jouent un rôle primordial pour la vitalité démocratique de notre société face aux défis du XXIème siècle. Dans leur processus d’innovation sociale pour répondre à des besoins non satisfaits, elles impliquent les citoyens. Cette participation citoyenne conduit souvent à faire évoluer un intérêt particulier vers l’intérêt général. Elles sont de ce fait des actrices clés au service de l’intérêt général.
Le HCVA considère que la contribution des associations à l’identification, à la construction et au déploiement de l’intérêt général devrait être reconnue au plus haut niveau de notre ordre juridique, dans le préambule de la Constitution : « La République reconnaît et soutient les actions des associations au service de l’intérêt général ».
Conclusion
Le rapport du HCVA met en lumière, au travers d’exemples concrets, la situation des associations confrontées à une prééminence de fait de l’approche concurrentielle sur l’appréciation de leur apport à l’intérêt général.
Cette situation est de plus en plus préoccupante. Le contexte géopolitique actuel qui multiplie les défis à relever tant au niveau macroéconomique que microéconomique[13] conduit de plus en plus d’observateurs à s’interroger sur la pertinence des règles de concurrence, qu’elles soient nationales ou européennes, pour répondre à ces défis.
Le rapport du HCVA contribue par ses demandes à l’infléchissement nécessaire des principes de la politique de concurrence. Le thème de l’intérêt général face à la concurrence est un thème porteur et général que l’ensemble des acteurs de l’ESS devrait s’approprier en agissant auprès des pouvoirs publics pour qu’ils fassent évoluer les modalités de mise en œuvre de la politique de concurrence.
Ce décryptage a été rédigé par :
Michel Catinat, référent sur les thématiques européennes au Labo de l’ESS et membre du Haut-conseil à la vie associative
Chantal Bruneau, Vice-Présidente du Haut-conseil à la vie associative
Claudine Jasson, Présidente de la commission juridique, comptable et fiscale du Haut-conseil à la vie associative
[1] Pour en savoir plus : https://www.economie.gouv.fr/cedef
[2] L’Union Européenne utilise le vocable d’économie sociale tout en mentionnant explicitement son équivalence totale avec la notion française d’économie sociale et solidaire.
[3] Définition issue du Plan d’action pour l’économie sociale (2021) de la Commission européenne : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52021DC0778. Retrouvez un analyse du Plan d’action par le Labo de l’ESS à cette adresse : https://www.lelabo-ess.org/analyse-du-plan-d-action-europeen-pour-l-economie-sociale
[4] L’Art. 106 §2 du TFUE précise que les services économiques d’intérêt général sont soumis aux règles de la concurrence et le Protocole 26 du TFUE que les services non économiques d’intérêt général sont exclus du champ de compétence de l’UE.
[5] HCVA. (2025). Des propositions pour reconnaître, soutenir et encourager la contribution des associations à l’intérêt général dans un contexte concurrentiel. URL https://www.associatheque.fr/fr/fichiers/actualite/HCVA-rapp-adopte-le-6-juin-2025.pdf
[6] La gestion d'une association est dite désintéressée si toutes les conditions suivantes sont réunies :
- L'organisme est géré et administré par des personnes, qui n'ont aucun intérêt, direct ou indirect dans les résultats de l'exploitation ;
- Les dirigeants exercent leurs activités bénévolement ou sont rémunérés dans les limites prévues par la loi ;
- L'organisme ne procède à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfice, sous quelque forme que ce soit ;
- Les membres de l'association et leurs ayants droit ne détiennent aucune part, quelle qu'elle soit, de l'actif, à l'exception du droit de reprise des apports.
[7] Loi du 1er juillet 1901, Code du travail, Code de procédure pénale ou Code électoral. Voir le rapport du HCVA pour plus de détails.
[8] Des types d’activités déjà largement inclus dans le Code Général des Impôts aux art. 200 et 238 bis, comme entrant dans les critères d’éligibilité des œuvres ou organismes d’intérêt général à percevoir des dons ouvrant droit à réduction d’impôt sur les société et sur le revenu des personnes physiques.
[9] Les gouvernements des Etats membres peuvent alors attribuer des aides sans autorisation préalable de la Commission européenne.
[10] Rapport d’Enrico Letta « Much more than a market », présenté le 18 avril 2024 au Conseil européen.
[11] Voir par exemple une analyse par le Labo de l’ESS de la concurrence des secteurs lucratifs et non lucratifs au sein du champ de la prise en charge de la dépendance : https://www.lelabo-ess.org/la-prise-en-charge-de-la-dependance-par-les-secteurs-public-prive-non-lucratif-et-prive-lucratif
[12] Voir l’avis du Conseil Supérieur de l’ESS sur le bilan de la loi ESS de 2014, en particulier l’analyse de son article 15, publié le 27 juillet 2023.
[13] On peut citer l’indépendance stratégique, la réindustrialisation, la guerre commerciale, la montée de la pauvreté, l’exclusion sociale ou la transition écologique.
[14] OI-IS-CHAMP-10-50-10-20, §470
Annexe : Préconisations du rapport du HCVA « Des propositions pour reconnaître, soutenir et encourager la contribution des associations à l’intérêt général dans un contexte concurrentiel »
Associer tous les ministères concernés à la détermination du caractère d’intérêt général des associations
1. Solliciter, dans le cadre de la procédure de demande de rescrit, l’avis des ministères ayant un lien, eu égard à leurs activités, avec l’OSBL initiant la démarche afin de garantir une interprétation qui tienne compte de l’ensemble des éléments contribuant à l’intérêt général.
Actualiser la liste des caractères des œuvres et organismes d’intérêt général.
2. Mettre à jour dans la base du Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP) (BOI-IR-RICI-250-10-20-10), les caractères des œuvres ou organismes d’intérêt général énumérés au 1. b) de l'article 200 du code général des impôts, à savoir notamment les caractères philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, familial, sportif et culturel.
3. Intégrer le Haut Conseil à la vie associative au groupe de travail conduit par la direction de la législation fiscale, avec d’autres administrations, qui aurait pour objet l’enrichissement de la base BOFiP sur les caractères des œuvres ou organismes d’intérêt général visés par les articles 200 et 238 bis du code général des impôts.
4. Formaliser, afin d’éclairer les associations, un recueil relatif aux rescrits à l’instar de celui reprenant la jurisprudence du Conseil d’Etat sur les associations et fondations reconnues d’utilité publique.
Ne pas remettre en cause le caractère d’intérêt général d’une association qui développe une activité économique lucrative
5. Augmenter le montant de la franchise en base des impôts commerciaux quand l’activité lucrative est accessoire.
6. Imposer les activités lucratives accessoires, hors franchise en base des impôts commerciaux, au taux réduit de 15% de l’impôt sur les sociétés.
7. Au mieux, au nom des spécificités des associations, les exonérer totalement des impôts commerciaux en retenant comme principaux critères le caractère totalement désintéressé de la gestion, le fait que l’ensemble des excédents est réinvesti au service du projet et que des bénévoles interviennent dans la mise en œuvre des activités, à l’instar de la plupart des autres pays européens comme, par exemple, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, la Suède, l’Italie, l’Espagne ou à titre comparatif, le Royaume-Uni, lesquels exonèrent d’impôt les activités lucratives directes lorsqu’elles sont liées à la mission (ex. : services éducatifs pour une association culturelle) et où les critères de l’activité lucrative « accessoire » à l’activité principale d’intérêt général sont à la fois plus sécurisants et plus souples.
Sécuriser les opérations de filialisation
8. Définir précisément la notion de « communauté d’intérêts »[14] utilisée de manière de plus en plus extensive par l’administration fiscale et en toute hypothèse inadaptée à la structuration par des associations de groupement d’entités de formes juridiques variées (SA, SAS, SARL, entreprise ESUS, coopératives, etc…).
9. Réviser, dans le cadre de la filialisation, la méthodologie pour déterminer si la détention des titres et/ou l’identité des dirigeants remettent en cause le caractère non lucratif de l’association mère (gestion active).
10. Revoir la doctrine fiscale relative à la notion de relation privilégiée entre une association et sa filiale, en révisant les notions de complémentarités économique et commerciale et en mettant à jour la liste des illustrations jurisprudentielles et doctrinales d’organismes entretenant des relations privilégiées avec des entreprises (BOI-IS-CHAMP-10-50-10-30 II).
Au niveau européen, reconnaître légalement les spécificités des associations et faciliter leur développement
11. Adoption par la Commission européenne d’une communication interprétative de l’article 54 § 2 du TFUE qui permette de pleinement reconnaître les formes d’organisation des associations et autres entreprises de l’économie sociale dont les spécificités ne peuvent se résumer à leur seule lucrativité ou non lucrativité.
12. Introduire dans le RGEC une nouvelle catégorie d’exemption pour les aides à l’accès au financement des entreprises de l’économie sociale dont les associations, comme envisagé dans le plan d’action européen sur l’économie sociale. Les restrictions éventuelles à l’accès aux aides qui pourront être introduites devront tenir compte des spécificités des entreprises de l’économie sociale et en particulier de celles des associations.
13. Adoption par la Commission européenne d’un plan d’action sur les services d’intérêt général incluant les services sociaux d’intérêt général et introduction d’une définition européenne du concept d’intérêt général.
Reconnaître l’antériorité de l’intervention des associations dans l’analyse fiscale de la non-lucrativité
14. Continuer d’exonérer des impôts commerciaux, au motif de l’antériorité de leur intervention, les associations se trouvant en concurrence du fait de l’évolution du contexte et d’arrivée d’acteurs économiques lucratifs sur le même champ.
En effet, comme il existe un critère de périmètre géographique pour apprécier la concurrence, le HCVA demande que soit introduit dans le BOFiP un critère chronologique d’antériorité de l’intervention associative lui permettant - en raison de son activité d’intérêt général - de ne pas être soumise aux impôts commerciaux et, le cas échéant, de continuer à bénéficier de subventions de la part des autorités administratives.
Accompagner le rôle d’expérimentation et de laboratoire des associations
15. Faire connaître plus largement les possibilités de financement des initiatives innovantes des associations.
16. Au mieux créer un fonds de soutien spécifique destiné à financer les initiatives associatives innovantes : mises en œuvre pour répondre à des besoins repérés, mal ou non satisfaits et s'adressant à des populations qui ne peuvent en assurer le paiement total.
17. Au moins mobiliser des crédits du Fonds de développement de la vie associative (FDVA) pour financer ces innovations.
Reconnaître dans la Constitution les actions des associations au service de l’intérêt général
18. Introduction dans le préambule de la Constitution d’une reconnaissance explicite des actions des associations au service de l’intérêt général qui pourrait être rédigée comme suit : « La République reconnaît et soutient les actions des associations au service de l’intérêt général. ».
Travailler avec les administrations pour la mise en œuvre des préconisations
19. Mettre en place dans un délai rapide une table ronde rassemblant les différentes administrations partenaires et associations, ainsi que le HCVA, sur le thème « les associations et l’intérêt général au regard de la concurrence ».