Tribune
Publié le 27 mai 2015
Hugues Sibille

Hugues Sibille

Président du Labo de l'ESS

Un choc coopératif dans l’air ?

Les Coopératives ont le vent en poupe. Au plan international après 2012 décrétée par l’ONU, année mondiale des coopératives, le sommet de Québec en 2014 a confirmé une dynamique coopérative à l’échelle de la planète, avec un milliard de coopérateurs dans le monde. Au plan français le vent coopératif souffle également. La Loi relative à l’économie sociale et solidaire du 31 Juillet 2014 met l’accent sur le développement Coopératif, en particulier celui des Scop, des Scic et des CAE. Il promeut la révision coopérative qui rend compte des résultats tangibles de la spécificité coopérative. Au plan du financement, le Crédit Coopératif, la BPI et des investisseurs de l’ESS vont très prochainement lancer un Fonds d’investissement de plus de 70 Millions d’euros : Impact Coopératif.

S’agit-il pour autant du choc Coopératif souhaité par Benoit Hamon alors ministre en charge de l’ESS ? Il y a du chemin pour passer du vent en poupe au choc coopératif ! Certes la crise produit un fort renouveau d’intérêt pour cette forme singulière d’entreprendre : la coopération est fille de la nécessité.

Les principes coopératifs, excédents mis en réserve, réserves impartageables, gestion démocratique, démontrent la résilience coopérative par gros temps. Mais la crise et une Loi ne suffiront pas à elles deux à produire "mécaniquement" le véritable changement d’échelle possible et attendu. D’autant que la nouvelle Commission européenne marque peu d’intérêt pour le moment pour cette forme d’entreprise. Les chiffres, s’ils marquent une progression, restent modestes. 268 créations de Scop et Scic en 2013 alors qu’il s’est créé 535 000 entreprises en France la même année dont plus de 150 000 sociétés. Il n’y a "que" 2 000 Scop employant 40 000 personnes sur un parc d’entreprises de plus de 2 Millions. A titre de comparaison, en Espagne, une Loi de 1986 a institué les Sociedades Laborales, entreprises sous contrôle des salariés : en 20 ans il s’en est créé 20 000 employant 130 000 personnes.

C’est l’histoire de la bouteille à moitié vide ou à moitié pleine selon comment on la regarde. Au Labo de l’Ess nous croyons vivement à la Coopération comme forme vertueuse d’organisation économique et souhaitons que la bouteille coopérative se remplisse nettement. Comment ? En accroissant significativement la création d’entreprises coopératives et en particulier d’entreprises à fort potentiel de développement. Beaucoup reste à faire pour proposer cette forme d’entreprendre autrement aux créateurs. Ensuite en faisant émerger des coopératives de taille intermédiaire. Notamment en favorisant la reprise d’entreprises par les salariés. 600 000 patrons vont partir en retraite dans les années qui viennent. Il y a là un petit boulevard. Un certain nombre d’Associations de taille significative pourraient également choisir le statut de Scic dans l’avenir. Enfin en diversifiant les secteurs coopératifs.

Par exemple dans la transition énergétique, sujet sur lequel travaille le Labo.

1000 coopératives de production d’énergie alternative sont actives en Allemagne. Nous en sommes loin. Pour commencer aidons (par exemple) la Scic de distribution d’énergies renouvelables, Enercoop, à changer d’échelle. Il y a bien d’autres secteurs dans lesquels les coopératives pourraient se développer comme le logement participatif et plus largement l’économie collaborative. C’est un paradoxe de voir cette économie collaborative emprunter souvent le chemin de l’entreprise capitaliste. 

Si nous promouvons les pôles territoriaux de coopération économique, les PTCE, c’est parce que nous croyons que l’heure de la Coopération a sonné et qu’il est temps de sortir d’une hyper concurrence conçue comme un dogme. 

Alors oui vive le Choc Coopératif, vite.

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